Interview avec JIMM pour la sortie de l’album Distorsion cérébrale

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Interview avec JIMM pour la sortie de l'album Distorsion cérébrale

Bonjour Jimm ! Tu viens de sortir ton 3ème album. Dirais-tu que c'est celui de la maturité ?

Je sais que l'on a coutume de dire ça à propos d'un troisième album, mais je pense que cette expression ne veut pas dire grand chose, car j'essaie de m'améliorer à chaque album, donc de gagner en maturité. Je pense que les textes, la voix, la production et le songwriting sont meilleurs sur cet album que sur les précédents. Mes parties de guitares ne le sont peut être pas mais elles sont plus variées. Donc d'un point de vue général je pense qu'il s'agit clairement de mon meilleur album. A chaque nouvel album j'essaie de faire mieux que le précédent, et j'espère que le prochain sera meilleur que celui ci, donc plus mature. Sinon je ne vois pas l’intérêt d'en faire un nouveau si c'est pour régresser. Je parle d'albums du même style musical bien sur, car on ne peut pas comparer 2 albums s'ils ne sont pas dans le même registre.

 

Tu écris, tu composes, tu enregistres presque tous les instruments seul (sauf la batterie), pourquoi ce choix ? Est-ce une volonté de tout maîtriser ?

Il y a un peu de ça oui, mais aussi par plaisir de jouer car je suis musicien avant tout. En studio jusqu'à présent j'ai enregistré la guitare, la voix et la basse sur chacun de mes albums. Je ne suis pas bassiste mais j'ai déjà joué de la basse en groupe et j'ai un niveau de guitare suffisamment bon pour me permettre de jouer de la basse sur mes morceaux, qui sont relativement simples. Et il y a le coté pratique également. Je connais déjà mes morceaux quand je rentre en studio mais je ne sais jamais quand je vais enregistrer la basse. Je l'enregistre après mes parties de guitares rythmiques et avant les solos mais il n'y a pas de planning établi, donc quand tu es seul c'est beaucoup plus simple à gérer au niveau de l'organisation. Par contre depuis 2 ans j'ai un excellent bassiste en la personne de Xavier, qui apporte quelque chose en plus aux morceaux, je m'en rends compte en live. Je lui demanderai de jouer sur le prochain album du coup. En fait j'ai longtemps galéré à chercher un binôme / chanteur pour composer avec moi mais je n'en ai jamais trouvé. Donc je me suis mis à chanter. Comme je composais les parties instrumentales de mes premiers groupes, j'ai également commencé petit à petit à écrire des textes et des lignes mélodiques, donc des chansons entières. J'ai essayé de composer en groupes, lors des répètes par exemple mais dans mon cas ce procédé ne marche pas, à de rares exceptions près. L'inspiration n'est pas quelque chose que je contrôle et je ne me force jamais à composer. Passer des heures à jammer en groupes lors de répètes dans l'espoir de trouver un riff ou une ébauche de titres est une perte de temps, car j'ai besoin d'être seul pour composer et être efficace. Le bon riff vient très souvent d'une manière spontanée sans prévenir. Ça peut paraître égoïste car on a l'habitude de dire que la musique est un partage mais avec le temps j'ai compris que c'était de cette manière que je devais procéder. Et d'une manière générale je pense qu'un groupe n'est pas une démocratie en ce qui concerne la partie créative, il y a des différences de compétences au sein d'un même groupe. Tout le monde n'est pas capable d'écrire une bonne chanson et c'est rare d'avoir plus d'un ou deux bons songwriters ou compositeurs au sein d'un même groupe. Donc si tu commences à instaurer le procédé du "on est un groupe on compose ensemble, chacun amène une compo etc", uniquement pour faire plaisir à tout le monde, à mon avis c'est mal barré. Il faut prendre les meilleures choses, et chacun doit savoir rester à sa place.

Avant JIMM j'ai jouais dans un groupe pendant une dizaine d'années, avec des amis d'adolescence, et on avait des divergences musicales donc je me suis longtemps senti bridé et frustré de ne pas pouvoir jouer ma propre musique comme je l'entendais, donc voila pourquoi aujourd'hui je n'ai plus envie de me prendre la tête à essayer de composer avec autrui, au sein de JIMM en tout cas. Je fais ce que j'aime et ce que je veux. Après par contre j'ai besoin d'un avis externe, une fois les maquettes réalisées, car je n'ai pas le recul nécessaire pour juger des défauts des titres par exemple, donc là je fais écouter les morceaux à pas mal de personnes (musiciens et non musiciens) et j'essaie de m'entourer d'un producteur capable de tirer mes morceaux vers le haut.

 

Comment s'est passé l'enregistrement ?

 

Alors je vais te répondre très honnêtement. L'enregistrement à savoir les prises en lui même, s'est bien passé mais pas le mix ni la manière de faire sur la fin. J'ai enregistré dans un superbe studio parisien dans le 15 éme, à 5 mins de chez moi, qui m'avait été recommandé par une amie qui avait déjà travaillé dans ce lieu, mais pas avec le propriétaire. Les prises ont eu lieu entre mi-mai et fin juin 2017, et le mix à partir de septembre, moment où les choses se sont gâtées. Pour faire simple, les mix finaux étaient mauvais, inexploitables à des fins commerciales, et indignes du prix que j'ai payé et du matériel à disposition. J'ai dû faire remixer entièrement l'album. J'avais pourtant émis des doutes sur la qualité des pré-mix fin juin, mais j'ai fait confiance à la personne (à sa demande) en charge de la réalisation de mon disque.

De plus il n'a pas respecté le pacte financier que l'on avait conclu et il était souvent absent des sessions les après-midis. Et j'ai surtout fait l'erreur de payer les trois quart de la somme avant le mixage, à sa demande encore une fois. Ensuite le planning a été mal géré, les jours de studio ont été étalés sur quasiment 6 mois, c'est qui rend la chose éprouvante nerveusement. J'ai également du matériel qui a disparu lors de ces sessions (câble et jack de guitare). J'étais vraiment dégoûté et encore aujourd'hui, je ne l'ai pas digéré et je m'en veux d'avoir été si naïf et de lui avoir fait confiance. Lors du remix je me suis rendu compte de pas mal d'anormalités dans les sessions. Étrangement je n'ai plus jamais réussi à joindre cette personne dés lors que je lui ai demandé des explications

 

Pourquoi avoir choisi de retravailler avec Fred Duquesne pour la seconde fois ?

En fait Fred a remixé l'album à partir des sessions enregistrées précédemment. J'ai récupéré mes sessions fin novembre 2017 et j'ai contacté Fred car j'avais déjà bossé avec lui sur mon précédent album et j'avais été content du résultat. Et j'ai de nouveau été très satisfait du son qu'il a donné à mon nouvel album. C'est quelqu'un de passionné et qui n'hésite pas à donner son avis sur les morceaux, du coup il apporte un vrai plus à ma musique, il ne se contente pas de faire le boulot d'un simple ingé son, il a ce coté producteur au sens américain du terme, et c'est ce que je recherche également.

 

Quels sont les thèmes abordés dans cet album ? Certains de tes titres sont assez revendicatifs, est-ce qu’un jour tu seras moins révolté ?

Alors en fait il y a toujours 2 axes dans mes textes : un partie autobiographique et mon regard sur certains sujets.

C'est vrai que les textes pour cet album sont plus revendicatifs que sur les précédents mais c'est surtout la musique qui l'a voulu. Par exemple les textes de "Nos élites" et "L'ivresse du pouvoir" ont été écrits vers 2012/2013 sur d'autres musiques, mais non retenus pour le précédent album. Je les ai ressortis pour cet album, j'ai juste changé la musique. Pour le coté révolté j'en sais rien mais je suppose que passé un certain âge on devient de moins en moins « énervé ». A ce moment là il sera peut être temps de passer à autre chose.

 

Tu reprends dans un cet album un titre de Gainsbourg. N’est-ce pas une façon de lui rendre hommage ainsi qu’à nos grands de la chanson française ? N’est-ce pas une façon de revendiquer le fait de chanter en français ? C’est quelque chose que tu pourrais refaire sur un autre album ?

Alors je n'ai pas fait cette reprise dans une optique d'hommage non, mais tout simplement car j'aime beaucoup ce morceau et que je pensais pouvoir en faire une version rock radicalement différente. Faire une reprise à l'identique ne présente pas grand intérêt selon moi. La version originale est très épurée, il y a juste une guitare et la voix, donc matière a faire.

Et oui quelque part c'est une façon de revendiquer le fait de chanter en français, même si je l'ai toujours revendiqué et assumé depuis mes débuts. Je pourrais le refaire sur un autre album oui, il faut juste que je trouve le titre adéquat à reprendre.

 

J’ai lu dans d’autres interviews que tu chantais en français par manque de maîtrise de l’anglais, mais quand on a des textes aussi forts que les tiens, n’est ce pas aussi une nécessité, ou un atout, de chanter en français ?

Alors c'est vrai que je dis toujours ça dans les interviews mais pas que. La raison principale au fait que je chante en français est que je suis français, tout simplement. D'une manière générale, je pense que si tu as des choses à dire tu dois le faire dans ta langue maternelle. Si tu n'as rien à dire c'est très facile de meubler avec trois mots d'anglais, et presque personne n'ira voir ce que tu racontes, contrairement au français où la compréhension est souvent directe. Et c'est toujours plaisant de savoir que les gens prêtent une attention à ce que tu racontes.

J'ai du mal à concevoir que l'on puisse s'exprimer totalement dans une langue que l'on ne maîtrise pas. De plus j'ai toujours écouté du rock en français, joué dans des groupes qui chantaient en français. Donc je ne me suis jamais posé la question du choix de la langue. Après oui je dis toujours que j'ai un anglais niveau lycée et un accent merdique, c'est la vérité, donc même si je voulais chanter en anglais ce serait compliqué, car je serais très limité et surtout ridicule.

 

L’album est sorti depuis le 30 novembre, quels retours en as-tu ?

Pour l'instant c'est plutôt encourageant. J'ai été assez surpris des retours dans les médias à vrai dire. Maintenant j'espère que l'album va m'ouvrir des portes au niveau des concerts.

 

Tu as accompagné le chanteur de rock australien Simon Chainsaw sur sa tournée européenne au printemps 2016. C’était une volonté de faire autre chose ? Comment s’est passée cette tournée et qu’en as-tu retiré ?

Alors oui effectivement je l'ai accompagné dans son backing band où j'officiais en tant que guitariste ! C'est d'ailleurs sur cette tournée que j'ai rencontré Guillaume "Turbo" qui était le batteur du groupe et qui joue sur "distorsion cérébrale" !

J'ai rencontré Simon en 2013 si je me souviens bien, via un ami musicien (Fred Alera). Il devait faire une tournée cette année là et il cherchait un bassiste, Fred m'a proposé le plan. Finalement la tournée a eu lieu 3 ans plus tard, et Fred ne pouvant pas la faire Simon m'a alors proposé le poste de guitariste. On a fait une vingtaine de dates, sur 3 semaines, quasiment tous les soirs donc. En France, Suisse, Allemagne et Italie. C'était vraiment cool. Un peu fatiguant sur la fin mais j'en garde de très bons souvenirs.

 

Tu as déjà pas mal tourné, avec de nombreux groupes. Quelles expériences tu en retiens ? A quand les prochaines dates ?

Je n'ai pas eu beaucoup de groupes en fait. J'ai eu mon premier groupe à l'âge de 16 ans, on a changé trois fois de nom en 10 ans et plusieurs fois de line-up mais c'était la même musique, la même base. Ensuite j'ai joué de la basse dans un groupe de rock français, Berezina. Puis JIMM.

Plus on joue, plus on gagne en expérience bien sûr. Mais j'ai aussi acquis pas mal de confiance en moi, surtout depuis que je chante. Car entre être simple guitariste dans un coin de la scène et chanter tes propres chansons sur le devant de la scène, devant des gens qui vont t'écouter, te fixer et parfois te juger, il y a un monde. Tu t'exposes beaucoup plus. Ce n'était pas forcement évident au tout début, surtout que je suis d'une nature assez réservée et que je ne me considère pas comme un bon chanteur, j'ai un peu forcé ma nature on va dire. Heureusement j'ai ma guitare qui m'aide beaucoup et me sert de bouclier ou d'arme sonore, au choix. Je ne pourrais pas chanter sans ! Le meilleur entraînement pour progresser et m'assumer en tant que chanteur a été d'aller jouer dans des bars des reprises guitare acoustique / voix entre 2009 et 2012.

 

Tu as aussi partagé l’affiche avec d’autres groupes, dans des tournées ou des fests, était ce de bonnes expériences ? Est-ce intéressant « se confronter » à d’autres styles musicaux sur une même affiche  ?

Oui sur des soirées rock / metal on est toujours 3 ou 4 groupes en général. La plupart du temps ce sont quand même des groupes du même style pour la cohérence de la soirée, voir même des groupes que l'on connaît personnellement ou avec qui on a déjà joué. J'ai beaucoup de bons souvenirs oui, pas forcement dans les concerts où il y avait le plus de monde d'ailleurs, mais aussi quelques mauvaises expériences ou déceptions, évidemment.

Sur les festivals par contre on a déjà joué avec d'autres groupes d'un style radicalement différent. Plutôt que de se confronter à des groupes d'un autre style  je pense que c'est intéressant de se confronter à un public qui n'écoute pas forcement de rock habituellement. Après honnêtement, sur les festivals je ne vois pas jouer tous les groupes. Par exemple je ne vois quasiment jamais le groupe qui joue avant nous car je me prépare, ni celui d’après car je suis occupé à ranger mon matériel puis à vendre du merch.

 

 

Parle-nous du clip qui accompagne cet album

C'est un clip qui illustre le morceau "Big Brother" qui est à mon sens le meilleur morceau de l'album et le single évident. Je travaille avec le même réalisateur depuis des années, Matthias Castegnaro, et son équipe. Lorsque je lui ai parlé de tourner un clip pour ce titre, il a rapidement eu l'idée d'une séquence de shibari (bondage japonais) pour illustrer le texte, et j'ai trouvé ça intéressant. On a tourné le clip dans un lieu qui s'appelle la "Place des Cordes" à Paris, la tournage a duré un soir. La danseuse est une amie de Matthias et s'appelle Élodie (elle apparaît également sur 2 de mes clips précédents).

 

Tu es maintenant distribué par Juste une Trace, pourquoi ce label et comment s’est faite la rencontre ?

 

Alors la rencontre s'est faite en août 2018 grâce à Élodie d'Ellie Promotion, qui travaille depuis peu chez Juste Une Trace, et que je connais depuis quelques années. Elle m'a contacté car le label cherchait un groupe de rock chantant en français, j'ai donc fait écouté mon album à Élodie et Paul Bessone (le patron du label), et ils ont bien aimé. On s'est donc rencontré fin août et on a alors convenu d'une sortie de l'album pour fin novembre.

 

J’ai lu dans une autre interview que tu faisais une formation d’ingé son. Finalement, tu te consacres entièrement à la musique ?

 

Oui c'est exact. En fait j'ai un diplôme de pharmacien (doctorat en pharmacie), j'ai fait 6 ans d'études à Limoges, et j'ai travaillé dans ce domaine pendant une douzaine d'années mais mon objectif a toujours été d’être musicien professionnel ou de travailler dans le milieu. Les studios enregistrements sont des lieux qui m'ont toujours fasciné. Je traînais l'envie de faire une formation dans l'audio  depuis des années donc voila c'est chose faite. Bizarrement je n'ai jamais eu envie de faire une école de guitare à vocation professionnelle, d'une part car je ne considère pas la pratique instrumentale comme quelque chose de scolaire et aussi parce que mes idoles de jeunesse comme Slash ne sortaient pas de ces écoles, donc je n'envisageais pas ce type de cursus comme une nécessité pour devenir un bon musicien. J'ai pris quelques cours à mes débuts bien sûr, mais ensuite j'ai bossé dans mon coin selon mes envies, en essayant de me forger ma propre identité

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