De retour après 9 ans d’absence, Lag I run revient avec un nouvel opus qui ne va pas vous laisser de marbre. Qualifié OVNI musical par de nombreux chroniqueurs, très bien accueilli par la critique et le public qui a déjà eu la chance de voir le groupe en live, le retour de Lag I Run marque de son empreinte cette fin d’année musicale. Un mélange de pop, de métal, de prog, et bien d’autres influences encore, beaucoup de talent de la part de musiciens hors pair, donnent à cet album un son et une atmosphère qui sortent des sentiers battus. Et si je puis me permettre un petit conseil, vous devriez demander au Père Noël de déposer cette petite merveille dans vos souliers.
1 – Vous revenez en cette fin d’année 2019 avec un nouvel album, après 9 ans d’absence, était-ce le temps nécessaire pour le composer ?
Nay : on pourrait aisément le penser mais ça n’est pas le cas ! l’album a été composé en 2012, malheureusement des événements personnels et indépendants de ma volonté m’ont écarté de la musique pendant plusieurs années… l’avantage c’est qu’après tout ce temps j’ai assez de matériel pour les 3 prochains albums ahah !
2 – Pour ceux et celles qui ne vous connaîtraient pas, pouvez-vous présenter votre univers musical ?
Nay : Je considère que nous sommes un groupe de Rock, ni plus ni moins. Beaucoup considèrent que nous faisons du Prog vu la durée de certains de nos morceaux, la complexité globale de la composition et la richesse de nos arrangements, ayant grandi en écoutant (entre autres) Genesis, Yes, King Crimson et j’en passe, je ne suis pas du tout contre cette appellation, mais je n’ai pas pour autant le sentiment qu’on soit représentatifs à 100% de ce style là. Pour moi le terme « Rock » englobe un panel beaucoup moins restrictif de sous-genres que nous empruntons comme bon nous semble au même titre qu’avec le Prog. Notre musique est une invitation au voyage, sur fond de grosses guitares certes, mais si vous décidez de partir avec nous, cette traversée vous emmènera très loin, avec la promesse d’un dépaysement constant et ce jusqu’à la dernière seconde de « Vagrant Sleepers ».
3 – Le spectre de vos influences musicales est très large, comment arrivez-vous, à le retranscrire et à donner cette cohérence à l’ensemble de l’album ?
Nay : Je pense que le meilleur moyen de donner de la cohérence à un album réside justement dans le fait de ne pas chercher à y retranscrire ses influences, mais plutôt d’essayer de retranscrire ses émotions en musique. Les influences seront là quoi qu’il arrive de toute façon, comme un code génétique en perpétuel mouvement. L’étalage d’une ou même de cent références ne fera pas nécessairement un bon album, en revanche si tu puises dans tes émotions avec authenticité et honnêteté intellectuelle, il y a fort à parier que l’harmonie entre les morceaux se fera d’elle même et sans forcer. Cela peut sembler un peu cartésien certes mais c’est mon point de vue !
4 – En France, on aime bien catégoriser, mettre tout le monde dans des cases. Vous êtes inclassable, revendiquez-vous cette forme de liberté et n’est-ce pas un peu risqué de sortir des sentiers battus ?
Nay : Personnellement je ne revendique absolument pas le fait d’être inclassable mais je suis extrêmement rassuré de l’être, en gros et pour être plus clair : toute forme d’art devrait être unique, et donc originale ! Tu fais d’ailleurs toi-même le parallèle entre le fait d’être inclassable et celui d’être libre, c’est déjà en soi une très belle réponse à ta question je trouve ahah ! Nous vivons dans un monde fait d’indépendances fictives, je veux bien prendre parfois la liberté d’être esclave comme disait Jules Renard, en revanche lorsqu’il s’agit de musique il ne devrait plus y avoir ni barrière, ni loi, ni précepte, mais seulement la liberté. Et maintenant pour ce qui est du risque… lequel finalement, Le risque de ne pas vendre un million de disque ? Bien qu’on ne cracherait pas sur la gloire, nous ne faisons certainement pas de la musique pour cette raison. Le risque de ne pas être compris ? Les gens sont libres ou non d’apprendre à nous apprivoiser mais nous resterons toujours ce que nous sommes en substance. Le risque de ne pouvoir jouer avec personne ? Mais si on ne peut jouer avec personne, on peut jouer avec tout le monde… non ?
5 – Dans une interview, tu dis : « Ma culture est très largement basée sur les 70’s, finalement, une époque où l’on était beaucoup moins focalisés sur les styles de musique qu'aujourd’hui, et où les groupes expérimentaient constamment de nouvelles choses, de nouveaux sons ». C’était une époque foisonnante, qu’en est -il aujourd’hui ?
Nay : Les choses sont clairement plus compliquées, comme tu le disais, la labellisation est aujourd’hui systématique, mais le problème est plus général encore d’après moi, à l’heure où il fait bon balancer du selfie à outrance en prenant soin au préalable de jouer au bistouri virtuel, au point que ta propre mère ne te reconnaîtrait pas, à l’heure ou il faut lancer une bonne phrase quotidienne sur les réseaux sociaux comme si du jour au lendemain tu t’étais transformé en reporter sans frontière de salon et que l’équilibre mondial dépendait de ta pensée du jour etc… Pour le musicien c’est pareil, à l’époque on lui imposait un producteur qui était sensé le cadrer musicalement, un agent de com’ qui lui disait quoi porter, quoi dire etc… Il y avait donc régulièrement des conflits avec ces gens qui venaient t’expliquer quoi faire et comment le faire, des conflits assez sains je trouve! Maintenant il faut être tout ça à la fois, il faut être son propre cadre, son propre censeur, son propre flic en définitive ! Donc oui dans ce contexte, difficile de s’entendre dire « fuck off » à soi-même, c’est un exercice quelque peu schizophrène il est vrai, mais je trouve que la musique actuelle manque parfois de ce grain de folie ! Cela dit et fort heureusement il y aura toujours des gens assez « fous » pour œuvrer en totale liberté, sans se soucier de savoir quel public ils peuvent toucher et encore moins combien.
6 – L’artwork de votre album est exceptionnel. Personnellement, je lui trouve un côté « Méliès ». Qui en est l’auteur (e) et qu’avez-vous voulu exprimer à travers ce travail ?
Nay : Merci beaucoup pour ce compliment qui me touche énormément puisque c’est mon petit frère qui a réalisé ces dessins, il s’appelle Manuel Morvant et travaille actuellement à Angoulême en tant qu’illustrateur. Nous avons imaginé ensemble un tableau pour chacun des onze morceaux de l’album et Manu s’est occupé non sans un certain talent, de coucher nos idées sur papier. Seule la première page du livret est indépendante de la musique, elle évoque un « dormeur vagabond » à la recherche d’une issue… on peut imaginer que chacune de ces illustrations représente un monde dans lequel le dormeur pourrait se perdre. Les thèmes abordés dans les morceaux sont très personnels et aucun autre illustrateur que mon propre frère n’aurait été capable de traduire à la fois ma musique et mes textes de cette façon. Je suis aussi très heureux que tu fasses le parallèle avec Méliès, non pas que nous y ayons sciemment pensé au moment de la conceptualisation mais son œuvre fait incontestablement partie de notre univers !
7 – Est-ce que l’approche visuelle est aussi importante que l’approche musicale pour vous ?
Nay : Nay : J’aurais du mal à donner un ordre de valeur entre le visuel et la musique mais il me semble évident que dans ce contexte, les illustrations servent d’abord la musique, au même titre que les textes. Ils sont là pour porter l’auditeur un peu plus loin, pour l’accompagner de la façon la plus poétique possible sur nos sentiers, aussi leur importance est indiscutable ! Maintenant j’ai un bon paquet d’idées que j’aimerais voir se concrétiser un jour en live, notamment en ce qui concerne les décors, la vidéo-projection, l’apparition de personnages fantasques ou sinistres sur scène pendant qu’on joue, afin de créer l’illusion d’un petit théâtre expressionniste d’avant guerre… je fantasme évidemment ! Mais si on pouvait un jour avoir les moyens de le faire ce serait magnifique…
8 – Maintenant qu’on a parlé de vos différents univers musicaux et visuels, on pourrait parler de vous. Qui êtes-vous Lag I Run, d’où venez-vous ?
Nay : Fred, Volo & Krys sont trois musiciens pros avec un important background (enregistrements d’albums, tournées etc…) ils ont tous joué dans des formations aux styles très différents tout au long de leur parcours, ce qui leur a permis d’avoir aujourd’hui une grande ouverture d’esprit et un éventail de possibilités de jeu immense. Volo et moi sommes quasi voisins depuis qu’il a déménagé dans le Var il y a un peu moins de 10 ans pour enseigner la batterie. Quant à Krys & Fred, ils possèdent un studio dans le Luberon (le Retro Active Studio) où ils enregistrent de nombreux artistes lorsqu’ils ne jouent pas eux-mêmes. Et pour ce qui est de moi, je vis dans un quartier près de Toulon qu’on appelle La Garonne, je suis diplômé de la MAI et du conservatoire et j’enseigne la guitare. Lorsque je ne fais pas de musique je tente de vivre comme tout un chacun dans ce monde à la fois cocasse et terrifiant, pour ce qui est du reste, je préfère le raconter en musique.
9 – Comment avez-vous composé cet album ? Qui écrit, qui compose ?
Nay : J’écris les textes et compose la musique de LAG I RUN. Il y a plus de 7 ans donc, mes compères ont entendu l’ensemble des morceaux qui constitueraient « Vagrant Sleepers ». Seulement qu’on ne s’y trompe pas, Volo, Fred & Krys sont tous les 3 d’incroyables musiciens, pas juste des exécutants se contentant de maitriser leur instrument à la perfection, ce sont des musiciens au sens large du terme, qui réfléchissent à tous les détails et s’impliquent très sérieusement, Fred & Krys sont d’ailleurs d’excellents compositeurs –je vous invite à découvrir leur univers- et tout le monde, Volo compris, a son mot à dire en ce qui concerne les arrangements. J’ai plus appris en quelques années à leur contact que je n’aurais pu le faire en 10 ans de conservatoire, et sans eux et leur bagage musical singulier, l’album n’aurait pu se parer de si belles couleurs.
10 – Vous avez présenté votre album sur scène, que ressentez-vous au moment de passer du studio à la scène ?
Nay : J’ai attendu 7 ans avant de pouvoir jouer ces morceaux devant un public, alors dire que je suis au bord de l’explosion cosmique à chaque fois que l’occasion se présente est un euphémisme.
11 – Comment a-t-il été accueilli et quels sont les premiers retours que vous en avez ?
Nay : Jusqu’ici l’accueil qu’on nous a réservé dépasse toutes nos espérances, tout le monde se demande qui nous sommes et pourquoi on n’a pas entendu parler de nous plus tôt, on nous qualifie d’OVNI assez régulièrement, à tel point que je commence à me demander si mes parents ne m’ont pas caché quelque chose ahah ! Je suis plus qu’heureux et surpris de voir qu’un tel engouement autour d’une musique que j’ai pensée de la façon la plus intime qui soit s’avère possible et que des gens prennent plaisir à la découvrir…
12 – Est-ce que la scène est un moment important pour vous, ou préférez-vous le travail du studio et l’élaboration d’un album ?
Nay : La scène est très importante pour moi, j’ai beaucoup de mal à gérer et exprimer mes émotions en général et la scène est le meilleur moyen que j’ai trouvé pour lâcher prise et embarquer les gens dans mon univers, c’est un endroit où je me sens libre d’être moi-même. Cela dit j’adore aussi passer des heures et des heures sur mon ordinateur à composer et voir un album se dessiner au fur et à mesure dans ma tête, je suis d’ailleurs en ce moment même en train de plancher sur le 3ème…
13 – Quel est votre actualité à moyen et long terme ?
Nay : A l’heure actuelle nous cherchons à jouer le plus possible, et la chose n’est pas aisée en France, loin de là… alors chers amis lecteurs, si vous tombez sur ce message et que vous pensez que nous sommes en droit d’exister et d’aller plus loin, on compte sur vous pour passer le mot partout, le roi LIR n’est pas mort ! En parallèle on vous réserve dès janvier un bon lot de surprises, notamment sur Youtube mais je n’en dirais pas plus pour l’instant… gardez un œil sur nous, vous ne serez pas déçus !
14 – Je vous laisse le mot de la fin
Tout d’abord merci à toi pour cette interview et ces questions fort intéressantes ! Nous allons tout faire pour être plus présents en 2020 et nous imposer sur scène comme sur la toile, les critiques que nous avons eues jusqu’ici sont toutes unanimes et nous espérons qu’un maximum de gens écouteront et apprécieront cet album que nous croyons vraiment très spécial… ça n’est que le début d’un nouveau commencement !
![LAG I RUN - Thirteen [Official Audio]](https://www.loudtv.net/wp-content/uploads/2021/01/img_5ffc3f79b3f1a.jpg)
LAG I RUN – Thirteen [Official Audio]
From the upcoming album « Vagrant Sleepers » Lyrics : Neighbourhood was not only a sacred word -in this cloudless world- It was a chant in each and every mute jailbird -Wild kids defeathered- We were